lundi 6 juin 2011

Porteurs d'âmes - Pierre Bordage

« Porteurs d’âmes » de Pierre BORDAGE

ED. AU DIABLE VAUVERT, MAI 2007


Une sorte de roman à suspense sur le thème du voyage de l’esprit dans le corps de l’autre, façon d’évoquer les différences, de culture, de valeurs, de niveaux de vie. Du BORDAGE pur sucre, maîtrisé, peut-être un peu long, et qui pourtant laisse un peu sur sa fin vue l’ampleur du sujet.

Nous suivons durant la moitié du roman [qui comporte environ 500 pages] trois histoires indépendantes qui vont s’emboîter.

En premier lieu Léonie, une femme du Libéria âgée de 20 ans, prostituée par sa tante et son « amant », Lucius. Sa vie est un calvaire, elle est violentée, maltraitée par ses proches comme par ses clients. Ces derniers ne sont que des blancs. Parce que ça rapporte plus et cause moins d’ennuis.
Un concours de circonstances va permettre à Léonie de s’échapper vers la France où elle se retrouve dans un foyer d’accueil. Là, elle accepte, contre la somme de 1500 euros, de jouer les cobayes clandestins. A savoir, tester des médicaments.
Peu de temps après, sa naïveté la conduira à se faire piquer son argent. Déjà la menace d’expulsion apparaît, l’objectif « immigration zéro » oblige. Elle opte pour la fuite... mais depuis quelques temps, elle a le sentiment d’héberger une voix.

La seconde histoire est celle de Cyrian, étudiant à l’Ecole européenne supérieure des Sciences. Son objectif est d’intégrer une sorte de fraternité étudiante, le cercle des Titans. Pour cela il doit prouver qu’il a la carrure et être confronté à des rites de passage. Son mentor est un allemand répugnant nommé Johannes qui l’humilie. Le supplicié sera contraint s’il veut faire parti du groupe de lui offrir sur un plateau sa petite amie pour une nuit. En échange de ... la Translation. Il s’agit d’un voyage extracorporel [les expériences de la NDE : mort imminente] dans lequel l’âme quitte le corps du sujet pour s’immiscer dans un organisme humain de substitution. Les porteurs d’âme ne sont évidemment pas au courant...

Enfin le troisième récit, où l’on suit les vicissitudes d’Edmé, un flic de la Crim’ d’une cinquantaine de piges, blasé de la vie. Un cadavre féminin est trouvé dans la Marne. Viol suivi de meurtre sans aucun doute. Un présumé coupable est abattu d’une balle dans la nuque alors qu’il nichait dans une baraque clandestine.
Sont retrouvés dans le logement des cassettes porno, « Mein Kampf », des exemplaires d’une revue d’extrême droite. Alors que pour ses collègues l’affaire est close, Edmé obéit à son flair qui le porte à croire qu’il y a davantage à découvrir... Pour en avoir le cœur net, il retourne sur les lieux du crime avec une partenaire. Une femme va les conduire dans un endroit retiré sur l’île aux loups. Un cadavre les attend. Dans la foulée une vingtaine sont repêchés. Sauvagement mutilés...

Pour lire « Porteurs d’âmes », il faut avoir du souffle. Le roman est un peu trop long. Des trois histoires, celle de Léonie l’immigrante est la moins prenante. Le plus pénible est la répétition des comparaisons animales pour chacun des protagonistes. Tout y passe, du vautour en passant par la tigresse, le gorille, le hibou et j’en passe [il a oublié les éléphants le môssieur. C’est redondant et barbant. De plus, certaines idées laissent, à mon avis, à désirer [le massacre gratuit de squatteurs par les flics ; le fait d’éliminer tous les porteurs d’âme pour protéger le translateur ; le parti pris un peu facile pour les défavorisés [Léonie], etc.

Quelques reproches mis à part, « Porteurs d’âmes » vaut le détour. Il serait intéressant d’explorer plus en profondeur l’idée du voyage extracorporel avec toutes les questions que cela amène. Par exemple, jusqu’à quel point un individu peut-il être influencé par une autre âme ? Combien d’âmes un humain pourra-t-il transporter ? Dans quel but ? Qu’en est-il d’une éventuelle immortalité ? De l’éthique et de la religion ? Du sujet en tant que tel ? ... A la fin du roman, la porte est ouverte à une suite.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire