Titre : Locus solus
Auteur : Raymond Roussel
Editions Garnier Flammarion
Première parution : 1914
La présence de la mort dans "Locus solus" témoigne d'un épisode douloureux dans la vie de Raymond Roussel. A savoir la perte de sa mère, avec qui il était très proche, et l'a profondément affecté. Mais s'il est question de mort, celle-ci se tourne surtout en grotesque, l'auteur ne croyant pas à l'immortalité.
"Locus solus" indique le nom de la propriété de Martial Cantarel, dans laquelle se trouvent plusieurs laboratoires où il entreprend ses travaux scientifiques. Très fortuné, la fantaisie de l'homme peut s'épanouir sans limites. On y trouve une collection de dents humaines aux couleurs diverses, un immense récipient rempli d'eau avec à l'intérieur une femme dotée d'une chevelure musicale : "au moindre mouvement, chaque cheveu, entouré d'une sorte de mince fourreau aqueux, vibrait sous le frottement des nappes fluides". Elle peut respirer sous l'eau via une oxygénation spécifique (laquelle ?).
De plus, Cantarel est fasciné par la révolution française et les hommes-têtes. Rien de surprenant à découvrir qu'il possède la tête de Danton : "On eût dit que la vie animait de nouveau ce résidu de faciès tout à l'heure immobile. Certains muscles semblaient faire tourner en tous sens les yeux absents, tandis que d'autres s'ébranlaient périodiquement comme pour lever, abaisser, crisper ou détendre la région sourcilière frontale ; mais ceux des lèvres surtout remuaient avec une agilité folle tenant sans nul doute aux prodigieuses facultés oratoires possédées jadis par Danton". Cantarel s'amusa aussi à électriser le cerveau de Danton et "à sa vive joie, il obtint quelques imperceptibles sursauts dans les nerfs qui mouvaient jadis la lèvre inférieure". Mais ce n'était ni plus ni moins qu'une résurrection artificielle...
On le voit, Cantarel expérimente sur des choses très variées (je n'ai pas mentionné la course d’hippocampes, entre autres), allant volontiers dans le morbide, ou dans des tentatives totalement inutiles, sinon de laisser libre cours à son excentricité. Alors certes, certains passages sont divertissants, la construction du récit originale, mais globalement c'est pompeux, j'irai même jusqu'à dire que je me suis ennuyé. Le dossier nous apprend beaucoup de choses sur cette oeuvre non dénuée de qualités, mais pour ma part, elle m'a laissé sur le bord de la route.
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