lundi 6 juin 2011

CosmoZ - Christophe Claro

Titre : CosmoZ 
Auteur : Claro 
Parution : août 2010 
Editions Actes sud 


Claro est avant tout connu comme l’un des plus brillants traducteurs contemporains (Vollmann, Pynchon, Gass, Danielewski, Seth…). On lui doit également huit romans et un essai sur le métier de traducteur. Dans ce roman foisonnant, érudit et flamboyant, Claro revisite à sa manière le « Magicien d’Oz » Baumien ainsi que certains grands événements du XXè siècle (guerres, immigration, industrie cinématographique, etc.), dans un tourbillon de mots qui s’embriquent afin de nous conduire au pays d’Oz. 


Frank Baum a une adoration pour les poules. Il apprécie leur grâce, leur ruse, et surtout le mystère de l’œuf. Plus tard, il opte pour la création de son propre cirque dans la ville de Chicago. Son nom est tout trouvé : Oz – neuf et brillant, facile à écrire et à retenir. 
Finalement, ce sera un roman qui verra le jour en 1900, intitulé « Le magicien d’Oz ». 
Ailleurs, une tornade emporte Dorothy du Kansas à la porte du XXè siècle, elle y fait la connaissance des Munchkins. Tandis que les jumeaux nains Eizik et Avram ; Avram et Eizik ; ou l’inverse de vice-versa ? partent en ballon et atterrissent à Dreamland. De là ils entament leur recherche de la cité d’Emeraude, celle du pays d’Oz. 

En Europe, Oscar Crow (l’épouvantail) et Nick Chopper (le bonhomme en fer-blanc) sont sur le champ de batailles de la première guerre mondiale. Cette « Tornade, jaillie des canons », guidée par l’envolée de la raison en éclats (d’obus). Tout deux meurtries par des éclats, ils sont soignés par une infirmière qui répond au nom de Dorothy. Nick, à l’instar du bonhomme en fer-blanc baumien, est reconstruit. Son corps remodelé par des prothèses. Il n’a plus conscience de son corps, qui s’apparente à un automate, composé d’organes métalliques. D’autres séquelles post-traumatiques laminent le mutilé. Tel un « transistor humain », il entend des voix (parfois celle du poète T.S. Eliot), à défaut des palpitations de son cœur… et « son sang ne sourdait plus dans ses tympans de fer ». 

Une fois la guerre terminée, ils retournent au Kansas. Ensuite ceux-ci se dirigent vers la cité d’Emeraude « plus brillante que mille soleils ». Alors que leur créateur, Frank Baum, quitte ce monde en 1919, peinant profondément ses personnages. 

Les années 20 voient les vagues successives des immigrants aux Etats-Unis. Afin de contrôler plus à-même ces flux incessants, le gouvernement met en place le test de Binet-Stanford pour opérer une sélection. En raison de son inadaptation aux personnes concernées, les résultats sont affligeants. De plus, une frénésie stérilisatrice vise les attardés mentaux, les sourds, les aveugles et certains Amérindiens, dans un souci d’eugénisme. 

L’industrie cinématographique prend son essor (on y évoque le Nosferatu de Murnau, Georges Méliès et surtout l’empire Disney) jusqu’à l’énorme succès en 1937 de Blanche Neige et les sept nains, qui sera suivit de nombreux autres succès. 

De nouveau la guerre en 1939, cette boucherie irrationnelle, démesurée, qui débouchera sur des millions de morts, le plus grand Tombeau de l’Histoire : « La Porte s’ouvre, non sur un monde en train de prier pour la paix, mais sur une fête de tous les sangs ». … 



Servi par une plume majestueuse, un vocabulaire raffiné, l’auteur dresse par l’intermédiaire du roman « Le magicien d’Oz », un portrait d'une partie du XXè siècle tour à tour tranchant, acéré, touchant, somptueux, jubilatoire, qui procure un plaisir de lecture intense. Absolument incontournable !

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