Auteur : Umberto Eco (Italie)
Titre : De la littérature
Paru en 2005 aux éditions Livre de poche (VO, 2002)
Ce recueil d'articles éclectiques aborde la passion de Umberto Eco pour certains auteurs, des critiques d'oeuvres, ses influences littéraires, des analyses de signe et de style, son combat face à ce qui est faux, ou encore la manière dont il écrit.
Umberto Eco analyse des auteurs tels Dante (La divine comédie), Nerval (Sylvia), Joyce (Ulysse), Marx & Engels (Manifeste du parti communiste), Borges (Fictions), etc. Car dans chaque discipline, il y a les Grands et les autres. Le nombre de livres étant innombrable, à l'instar de la bibliothèque borgésienne et de ses galeries indéterminées ou peut-être infinies - qui n'est autre que l'univers, il faut éviter de perdre du temps avec des textes "mineurs". Eco parle également d'un auteur inconnu, Piero Camporesi, qu'il qualifie d'anthropologue culturel, dont l'oeuvre avoisine les quinze volumes. Ces textes sont tout autant écoeurants qu'attirants, si ils sont consommés à dose "homéopathique". Eco défend dans un autre article la sémiotique, dénigrée par certains pour son côté trop mathématique, dans la critique des textes. Dire pourquoi une oeuvre est belle, sa construction, sa narrativité, comment et pourquoi est-elle perçue ainsi par les lecteurs. Ce qui nous amène à l'essai sur les niveaux de lecture, le double coding, entre le lecteur lambda qui se contente de suivre l'intrigue, et le lecteur modèle, apte à comprendre l'ironie d'un passage, à saisir les références littéraires, musicales, cinématographiques, etc. Eco parle aussi de la "Poétique" d'Aristote, avec son influence et ses lacunes.
Dans le texte sur "La guerre du faux", l'auteur met en lumière quelques exemples d'erreurs (parfois des paralogismes, parfois des mensonges) telles l'hypothèse ptolémaïque, les Rose-Croix, la lettre du prêtre Jean, entre autres, qui sont instructifs. Enfin, un dernier mot sur le chapitre final dans lequel l'auteur se livre (un peu, mais pas assez à mon goût) sur sa démarche de romancier. On y voit son souci du détail, sa rigourosité, ses doutes, et le long cheminement du livre qui vit en lui durant plusieurs années. Il ne comprend pas comment des écrivains peuvent pondre un bouquin par an (certains sont bien plus prolixes) : "je suis toujours contrarié quand je m'aperçois qu'un de mes romans arrive à sa fin, c'est-à-dire que, selon sa logique interne, c'est le moment que lui finisse et que moi je m'arrête. Le beau, la joie véritable, c'est de vivre six, sept, huit ans dans un monde que vous êtes en train de construire peu à peu, et qui devient vôtre."
En conclusion, ce recueil se parcourt avec plaisir, en nous transmettant le goût de la lecture (et de l'écriture), et allonge la liste des livres à lire. Érudit et savoureux !
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