Auteur : Marc-Alain Ouaknin (France)
Titre : Mystères des chiffres
Editions Assouline
Parution : 2004
Philosophe et rabbin, Marc-Alain
Ouaknin est l’auteur d’une œuvre prolixe s’étendant des mathématiques à la
bibliothérapie, en passant par la Kabbale, la Bible, le Talmud, l’humour juif
ou encore un essai consacré au philosophe Emmanuel Levinas. Les « Mystères
des chiffres » retrace l’histoire des mathématiques, à la fois savante,
érudite et passionnante, tout en restant suffisamment accessible afin de ne pas
égarer les néophytes.
L’objectif de ce papier n’est pas
temps de reprendre l’intégralité du sommaire, fort riche, mais plutôt de cibler
par quelques exemples l’évolution de cette discipline, les questionnements
qu’elle engendre, les spéculations d’ordre métaphysiques sur la Création,
l’Homme et l’Univers dans la Kabbale, la fascination pour les carrés magiques,
le nombre Pi, l’invention du zéro, etc. et ainsi titiller la curiosité du
lecteur pour l’inciter à plonger dans cet émerveillement. Et c’est une personne
allergique aux maths qui vous parle. De là à dire que je suis réconcilié avec
elles, c’est un grand mot, néanmoins je les envisage sous un angle autrement
plus excitant que l’ennui abyssal suscité par l’enseignement scolaire.
Signalons pour commencer
l’existence de trois grands systèmes de numérotation. En premier lieu la
primitive, dont la répétition d’un signe correspond à un objet ; puis
l’ancienne avec soit des signes/symboles précis comme chez les Babyloniens,
Egyptiens et Mayas, soit l’alphabet lettres comme chez les Grecs et les
Hébreux. Enfin, la moderne, dont les signes numériques vont de 0 à 9.
C’est aux alentours du VI ou VII
siècle que naquirent les chiffres modernes en Inde, par l’intermédiaire d’un
jeu d’échec. En effet, pour remercier
l’inventeur de ce jeu, le roi s’engagea à le payer. Les mathématiciens du roi
utilisaient leurs doigts et des tablettes à compter (appelées Churkrum). Les
chiffres allant de 1 à 9 apparurent, tandis que le zéro devait encore
patienter. On suit à travers des graphismes les modifications des chiffres en
fonction des numérations successives.
Le zéro naît aussi en Inde. Au
début, ils laissaient un espace vide, puis en lieu et place de ce vide, ils
mirent un point ou un cercle pour combler l’ambiguïté de cet espace libre. En
sanscrit, le mot « shûnya » exprimait le vide et l’absence. Ensuite, il
y eu le zéro-point, puis les mathématiciens représentèrent ce futur zéro par
des signes de la voûte céleste. Le petit cercle en devint alors le symbole. Le
zéro était né. Cependant, c’est au XIIIè s que le néologisme « zéro »
apparut, via Fibonacci.
Intéressons-nous à présent à la
Fraternité pythagoricienne, créé par Pythagore au Vème siècle environ avant
J-C. Cette école était scindée en deux. D’un côté les exotériques : ils
devaient franchir une épreuve longue de 5 année de mise à l’épreuve afin de
s’assurer que les prétendants pouvaient tenir leur langue. Ils entendaient donc
les cours de Pythagore, sans le voir. Ce privilège revenait aux ésotériques.
Ceux-là même qui avaient franchi avec succès le premier obstacle. L’école se
prolongea sur dix générations.
La seconde partie de l’ouvrage se
veut nettement plus divertissante avec les particularités des nombres :
les mystères du 6 et du 28 ; le nombre d’or ; les nombres
amicaux que sont 220 et 284 ; les
carrés/étoiles/hexagone magiques. Ici l’on s’amuse à compter afin de vérifier
l’exactitude desdits carrés, en étant admiratif devant une telle perfection.
Ce bel ouvrage nous permet de
voir de quelle manière nous en sommes arrivés là, en terme de numération et de
connaissances mathématiques. Ouaknin a ainsi entreprit, à la manière d’un
Thucydide, une histoire causale de ce savoir scientifique, sans prétendre à
l’exhaustivité. C’est aussi l’occasion de (re)découvrir des spécificités
étudiées à l’école mais que l’on ne rencontre pas nécessairement dans la vie de
tous les jours. Et bien plus lorsque l’on envisage les mathématiques comme un
moyen de « décrypter » le monde.
Via une mise en page très
soignée, accompagnée de nombreux dessins venant illustrés les propos, les
« Mystères des chiffres » fourmille d’informations sous une plume
docte et limpide, aussi bien sur l’homo sapiens que sur l’homo ludens. En
somme, un morceau de choix qui devrait trouver une place dans n’importe quelle
bibliothèque digne de ce nom !
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