Auteur : Christopher Priest (ANG)
Titre : Les extrêmes
Editions Denoël : 2000 (VO, 1998)
Réédition en Folio SF : 2004
Dixième roman dans la prodigieuse bibliographie de Christopher Priest, "Les extrêmes" ne déroge pas à la règle des précédents opus. Il brille par les caractéristiques habituelles de l'auteur : à savoir, une exigence à la fois formelle et littéraire, un art d'altérer le réel, le tout dans un récit intelligent et subtil.
Teresa Banks, aujourd'hui âgée de 43 ans, vient de prendre une sorte de congé offert par le FBI, dont elle est l'une de leur agent. En effet, son mari, Andy, a été tué par un gangster dans un bled paumé du Texas. Commence alors un voyage qui va la mener au fond de l'abîme.
Elle se rend dans le village anglais de Bulverton. Les habitants sont encore traumatisés par la folie meurtrière de Gerry Grove qui assassina 23 personnes lors d'une fusillade. Cet évènement est survenu un an jour pour jour après la mort de son compagnon. Elle tente de recueillir les témoignages des villageois mais ceux-ci sont peu loquaces. Teresa s'inscrit dans un club pour faire des ExEx, des scénarios qui permettent de visualiser les scènes des grands massacres de manière virtuelle en étant dans la peau d'un des actants (celle d'un individu tué parce qu'il était là au mauvais moment, celle du tueur, etc). Ainsi, elle affronte plusieurs scénarios éreintant sur le plan physique et surtout psychique... et remonte inéluctablement jusqu'à la reconstitution virtuelle de la mort de son mari...
Lire Priest est une expérience littéraire fascinante et éprouvante. L'auteur interroge ici le rôle de la mémoire, la question de la mort, de la douleur lorsqu'il faut se reconstruire après le décès d'un être qui nous est cher. Mais aussi l'impact sur les plans psychique et émotionnel que cela créer lorsqu'une personne affronte les fantômes de son passé, même virtuellement parlant, pour obtenir des réponses ou pour mieux se perdre.
Intense, sans concession, ce roman brillant et bouleversant ravira les amateurs de Philip K. Dick. Le voyage, douloureusement raffiné, devrait marquer durablement le lecteur. On regrettera seulement que cet immense écrivain ne soit pas davantage connu du grand public, car une fois que l'on y a goûté, l'addiction opère. Et c'est de la sacrément bonne came !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire